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nouvelle tendance pour réapprécier la viande

Le lard, un bout de gras qui se défend

Le lard, un bout de gras qui se défend
Le lard, un bout de gras qui se défend

Le lard un bas morceau diététiquement infréquentable tout juste bon à donner du sel à vos soupes d’hiver ? Vous n’y êtes pas. Produit avec soin, c’est un petit morceau de paradis qui a sa place dans un menu trois étoiles. Rencontre avec Éric Ospital et Sébastien Gravé, deux grands fans de belles couennes.

Le lard, c’est le tissu gras sous-cutané de certains quadrupèdes à peau épaisse, notamment du porc. On le trouve dans la poitrine (ventrèche), le dos (bardière) ou même dans les joues, à l'instar du guanciale, ce lard typique du centre de l’Italie que l'on frotte avec du sel, du sucre, du poivre noir ou rouge, du thym ou du fenouil et mis à sécher pendant trois semaines. C’est le lard qu’il vous faut pour des vrais spaghetti carbonara. Il y a toutefois deux écoles, et certains utiliseront... de la pancetta.

La pancetta, elle, est issue de la poitrine. Elle est salée, très généreusement poivrée puis séchée. Souvent présentée roulée et dégustée en tranches fines, elle se cuisine grillée à la poêle pour obtenir une chips croustillante (à disposer sur un risotto comme Alain Ducasse), ou taillée en dés pour parfumer une fricassée. Ces lards italiens, tout comme le bon vieux lard que l'on ajoute dans une potee, ou le bacon cher aux Anglo-saxons sont les plus connus. Il existe pourtant d'autres spécimens plus ignorés.

Sagí, smalec : lards atypiques pour gourmands aventureux

 

En Catalogne, on fait du sagí, de la panne de porc (soit l’amas de graisse qui se trouve autour des rognons de la bête) salée et laissée à rancir sur un crochet. La chose ressemble à un gros rôti bien ficelé et tout blanc qui sent fort la porcherie. Les âmes sensibles s’abstiendront, les amoureux du gras l’utiliseront pour aromatiser viandes et poissons, mais surtout l'ollada potee catalane. Sinon, les plus courageux testeront le smalec polonais, du lard en tartinade agrémenté d'oignons et de marjolaine que l'on déguste, à l'apéritif, sur du pain de seigle avec des cornichons.

De la table du pauvre à la table étoilée                     

Ingrédient paysan par excellence, boudé parce que franchement gras, le lard a aujourd'hui acquis ses lettres de noblesse. Depuis deux décennies, il est d’ailleurs mis à l’honneur sur les plus grandes tables. Michel Bras et son garguilou, Marc Veyrat et sa soupe de courge ont ouvert la voie, d’autres ont suivi.

« Je compare ça aux topinambours, dont on disait "C’est pas bon, c’est pour les cochons". Maintenant on les trouve sur les tables des trois étoiles. Le lard, au niveau gustatif, ça vaut tous les jambons ibériques du monde mais il a fallu rééduquer les gens. À une époque, si dans l’assiette, il n’y avait pas des morilles, du homard et des truffes, ça n’était pas bon. Le lard est devenu un produit noble. Évidemment il y a de tout mais si c’est bien fait, bien découpé, bien affiné, c’est délicieux », affirme Sébastien Gravé, chef du restaurant pollonka et membre de la jeune garde du Sud-Ouest, qui a fait se pâmer les foodies au dernier festival de paris avec sa joue de cochon confite en voile de lard Ospital, haricots tarbais, vinaigrette de chorizo, pickles et anguille fumée. « Les grands chefs ont bonifié le lard, et puis le cochon est un mets populaire, donc pas cher, tout le monde y trouve son compte », estime de son côté Éric Ospital, le charcutier le plus coté de France. D'ailleurs, les stars ce sont eux : le lard de Colonnata et la ventrèche plate du Noir de Bigorre.

Le lard de Colonnata : gras grand teint                    

’un blanc nacré imperceptiblement veiné de rose, il serait le meilleur lard du monde. Ce monument de la gastronomie (vraisemblablement dégusté depuis l’an mille et détenteur d'une IGP depuis 2004) est prélevé sur des cochons sélectionnés du centre et du nord de l'Italie. Enduit de sel, niché dans le poivre, le romarin, l’ail et autres aromates tenus jalousement secrets par les producteurs, ce lard est entreposé six mois au moins dans une conca, une vasque de marbre. « Il a une petite acidité parce qu’il est mariné avec ces aromates », analyse Sébastien Gravé. Ce morceau de choix, au fondant incomparable, se suffit très bien à lui-même et se savoure tel quel (sur un crostini bien sûr). En cuisine, il peut servir de beurre de luxe pour faire rissoler des pommes de terre mais pas que. « Ce que j’adore, c’est qu’on peut s’en servir comme d’un assaisonnement de dernière minute. Je fais un ris de veau croustillant ou une Saint-Jacques à peine snackée. Je pose une tranche de lard de Colonnata dessus, il fond sur la pièce, on l’oublie presque, et au goût, c’est incroyable »,

Chauvin revendiqué, l'artisan charcutier basque eric ospital a lui une préférence pour la ventrèche du porc Noir de Bigorre - ce cochon de compétition élevé en pâture dans les Pyrénées – qu’il déguste grillée, « le matin avec un bon vin et dans le pain avec [s]on vieil ami Christian Etchebest ». Cette poitrine de porc salée au sel gemme de Salies-de-Béarn et affinée six mois sous du poivre noir concassé est aussi le coup de cœur de Sébastien Gravé. « Mes beaux-parents habitent dans un village des Hautes-Pyrénées, Poumarous, où Bernard Védère élève des Noirs de Bigorre qui vivent mieux qu’au Georges V. Leur lard a un côté noisette, gland, assez poivré. Par rapport au Colonnata, c’est davantage un produit à part entière, je l’utilise sur du pain frotté à l’ail ou un peu grillé sur un œuf coulant », détaille le chef.

Quand le lard a le pied marin

Pour lui, le lard est clairement un produit en or… et avec lequel on peut s’amuser. « Associé avec des choses de la mer, ça fonctionne très bien et c’est assez drôle », estime Sébastien Gravé. Et le chef d’évoquer quelques créations qu’il aime coiffer d’une feuille de lard : Saint-Jacques poêlée en croûte de noisette avec des belles asperges ou anguille fumée laquée à l’asiatique avec une sauce soja sucrée. On laisse le lard fricoter avec les Saint-Jacques ? Pas de doute, on a affaire à un grand produit.

 

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